A Gand en Belgique, l’atelier Kempe Thill et les agences aNNo, Baro et SumProject transforment un ancien cirque d’hiver en centre culturel. Il aura fallu, pour aborder cette architecture d’une beauté spatiale et d’une logique tacites, beaucoup de modestie et d’empathie. Et pour lui donner un nouvel usage, une approche contextualiste hors du commun.
Depuis sa construction en 1894 à partir d’une filature de coton, le Wintercircus Mahy dans le centre-ville de Gand, dans le nord-ouest de la Belgique, aura vécu de nombreuses vies. D’un cirque avec sa grande piste centrale et ses différents bâtiments de service, le lieu se verra transformé par un passionné automobile, Ghislain Mahy, qui entreprendra dans les années 1950 d’y créer son atelier. Ce dernier supprime alors de façon radicale la tribune intérieure en bois, ses ornements en stuc et son faux plafond, et de réduire le bâtiment rond principal à son ossature de béton. Il dévoile alors un atrium massif, un espace vide qui servira de point central à ses activités. Il ajoute ensuite, étape par étape, des rampes et de nouvelles extensions à l’extérieur du volume principal, de façon à rendre les étages accessibles à ses voitures.
« Toutes les transformations, extensions, espaces et détails ajoutés au bâtiment, témoignent de l’amour que nous portons à la construction d’origine, élégante et moderne ». Andre Kempe
Palimpseste
Fermé en 1970 le lieu avait conservé les véhicules jusqu’en 2000. Jusqu’à ce que l’atelier Kempe Thill et aNNo Architecten proposent une toute autre programmation. Les architectes imagient en ces lieux une salle de musique rock (pour 500 spectateurs), une bibliothèque pour aveugles, les archives médiatiques flamandes et une société informatique. Le bâtiment ne possède pas le statut de monument mais il fait partie du paysage urbain protégé et la transformation de l’intérieur est alors discutée par le comité de protection des monuments qui approuve le projet.
Guidés par les idées de John Ruskin sur la restauration des bâtiments historiques, et de sa lecture romantique quant à l’effet du temps et à la forme de décrépitude qui en découle sur les édifices, les architectes souhaitent prolonger le processus historique et s’attèlent à conserver l’authenticité du lieu tout en respectant son échelle monumentale.
Les architectes assimilent l’ancien espace du cirque à une place publique et au lieu de le remplir avec un programme supplémentaire ou un volume construit, ils proposent de le conserver intact et de le laisser entièrement vide pour servir d’espace ouvert à toutes sortes d’activités. Ils tirent parti de la circularité de l’édifice pour relier les différents quartiers de ville (dont l’un accueille la bibliothèque dessinée par RCR).
Située directement sous le sol de cet espace circulaire, une salle de concert rock a présenté un véritable défi acoustique, placée dans une construction en béton pour éviter les gênes sonores et séparer la logistique.
Un soin particulier est porté aux finitions après rénovation : le plâtre d’une part qui s’était partiellement détaché des murs pendant les mois d’abandon du bâtiment, et les sols béton que le propriétaire du garage avait peints en rouge. L’aspect brut des murs en briques non crépis a été conservé ainsi que la couleur vive, perçus comme la patine d’un long développement historique dont la rugosité et le caractère inachevé sont la trace.
« L’idée ici n’est pas de faire un projet poli, il s’agit plutôt d’une méthode de préservation où des facteurs tels que le temps et l’espace sont pris en compte ». Andre Kempe
Maîtres d’œuvre : Atelier Kempe Thill architects and planners Rotterdam, NL
Architects associés : aNNo architects Ghent, BE / Baro Architectuur Ghent, BE / SUM Project Brussels, BE
Maîtrise d’ouvrage : sogent Ghent, BE
Surface du site : 0,35 ha
Surface construite : 10 870 m2
Volume de l’édifice : 67 207 m3
Montant des travaux : 21 M€