L’architecture de Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa est une affaire de subtilité. Le duo japonais, qui opère sous le nom de SANAA depuis près de trente ans, façonne des espaces qui semblent s’effacer pour mieux révéler le monde. Une approche qui vient d’être consacrée par le Royal Institute of British Architects (RIBA). Une reconnaissance suprême, qui vient saluer une architecture d’une transparence trompeuse, où la légèreté apparente masque une rigueur absolue.
Le comité d’honneur du RIBA, présidé par Muyiwa Oki, a souligné la capacité de SANAA à « façonner un langage universel de l’architecture, résonnant avec chacun, partout dans le monde ». Leur travail, épure radicale, cherche toujours la limpidité du trait, la fluidité des usages. Dans un monde saturé d’informations et de stimuli, leur architecture s’impose comme une respiration, un contrepoint apaisé et apaisant.
Un minimalisme habitable
L’élégance chez SANAA ne tient ni au spectaculaire ni à l’ostentatoire, mais à une intelligence des volumes et des flux. Leur musée du XXIe siècle à Kanazawa (2004) se présente comme un cercle de verre où les salles s’organisent sans hiérarchie, invitant à une déambulation libre. Leur Rolex Learning Centre à Lausanne (2010) déroule ses courbes au ras du sol, dans une continuité fluide entre intérieur et extérieur. Même le New Museum de New York (2007), pourtant une superposition de cubes empilés, donne l’impression d’une légèreté paradoxale, comme si l’architecture flottait au-dessus de la ville.
Chaque projet de SANAA est une expérience sensorielle. Le Louvre-Lens (2012) disparaît dans le paysage, ses murs de verre captant les variations lumineuses du Nord. Grace Farms, dans le Connecticut (2015), serpente dans la nature, une toiture continue comme seul fil conducteur. Plus récemment, le Sydney Modern Project (2022) poursuit cette idée d’un bâtiment qui ne s’impose pas mais accompagne le lieu.



Louvre-Lens, France (c) SANAA
Grace Farms, USA (c) Iwan Baan
Une pensée en mouvement
L’harmonie chez SANAA repose sur une constante réflexion sur les matériaux, la transparence, la continuité des espaces. Cette apparente simplicité est en réalité le fruit d’une recherche inlassable. « Nous avons toujours cru que l’architecture pouvait transformer et réparer les environnements, nous aider à mieux nous relier à notre entourage, à la nature, aux autres », confient les lauréats. Leurs bâtiments ne cherchent pas à dominer mais à accueillir, créant des espaces de rencontre et d’interaction.
Cette reconnaissance du RIBA confirme une trajectoire d’une rare cohérence. Alors que le débat architectural oscille entre formalisme et activisme, SANAA trace une troisième voie, celle d’une poésie silencieuse, où l’invisible est tout aussi essentiel que le construit. Leur Royal Gold Medal vient saluer cette approche qui, sans bruit, transforme durablement notre façon d’habiter le monde.

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Sydney Modern Project, Australie (c) Iwan Baan
Bocconi University, Italie (c) SANAA