texte rédigé par les architectes
crédit photos Charly Broyez
À Tours, l’école Jean de la Fontaine a fait peau neuve. Lancé à l’initiative de la commune à la fin de l’année 2020, l’appel d’offres visait la démolition et la reconstruction de cet établissement édifié dans les années 1960. Au nord-est de la ville, dans un quartier en pleine mutation, l’école en place s’inscrivait dans un tissu urbain complexe présentant notamment une grande hétérogénéité d’échelles et de typologies de bâti. En plus de rendre lisibles l’établissement et ses abords, le projet d’ALTA rend hommage au patrimoine architectural et naturel des contrées ligériennes.
Le territoire de Tours, parcouru par la Loire et le Cher, est marqué par une forte présence végétale : coteaux boisés, parcs et aménagements paysagers, jardins privés et familiaux… Cet héritage, ainsi que les tracés des trames vertes et bleues, forment l’un des fils rouges qui ont guidé les architectes au fil de ce projet de requalification. De concert avec les paysagistes de FAAR, de nouveaux espaces extérieurs ont été imaginés, conjuguant gestion écologique et valorisation de la biodiversité avec des usages extérieurs prévus pour les écoliers.
Une implantation sensible
Inspirés par la pluralité de constructions qui caractérisent la région, depuis les gabarres voguant sur la Loire jusqu’aux cabanons fleurissant au sein des jardins familiaux, les architectes conçoivent cette nouvelle école comme un refuge. L’imaginaire de la cabane s’impose tant pour sa puissance évocatrice que pour la proximité suggérée avec un environnement sauvage. Cette figure bâtie onirique se décline dans la volumétrie des trois corps de bâtiment accueillant respectivement l’espace de restauration, les salles de classe et le gymnase. Leur horizontalité, leurs faîtages de faible hauteur et leurs dispositifs formels singuliers – tantôt chevauchements, tantôt débords de toitures – façonnent la silhouette de l’équipement en le signalant depuis la rue.
Inscrit sur une étroite parcelle en longueur, l’école Jean de la Fontaine présente une superficie de 1948 m2. L’implantation du projet associe les exigences du programme à une véritable volonté d’approfondir les liens établis entre l’école et son contexte paysager. Cette intention conceptuelle se lit en triptyque au fil de la progression dans le bâtiment, dont le premier volet est incarné par le parvis. Aux portes de l’établissement, ce dernier tient le double rôle d’espace d’accueil à l’adresse des écoliers et d’espace public ouvert aux parents et à l’ensemble des riverains. La rationalité de son dessin et ses dimensions généreuses facilitent une multiplicité d’usages et permettent un retrait rassurant vis-à-vis de la rue du Colombier.
Vient ensuite le bâtiment d’enseignement, dont le programme éducatif, lisible au-travers du plan, s’adjoint d’une dimension d’éveil. Les jeux d’ouvertures et de surélévations libèrent de fait des vues sur l’environnement et le paysage alentour. L’école se place en outre en trait d’union entre deux espaces extérieurs, depuis le parvis public jusqu’à la cour de récréation. Cette dernière, mise à distance de la rue et de ses nuisances, constitue le dernier panneau du triptyque. Conçue comme un espace de jeux et de détente, elle est également un terrain fertile, aussi stimulant qu’éducatif. Par effet de contraste avec le parvis, son aménagement associe des formes organiques à une forte présence végétale, mettant en valeur les arbres déjà présents.
L’architecture au service du confort d’usage
La composition de l’école en ligne brisée définit des usages distincts en leur associant des temporalités propres. Elle permet également aux espaces intérieur de profiter d’expositions traversantes sud-est et nord-ouest. La figure de la cabane se retrouve à nouveau dans la valorisation de matériaux sobres – à l’instar de la paille et du bois – non polluants, biosourcés, sans composés organiques volatiles, issus de circuits courts, favorisant l’économie circulaire et la préfabrication… Depuis les matériaux constructifs aux éléments de finition en passant par les isolants, les produits mis en oeuvre ont fait l’objet d’un sourcing rigoureux, en adéquation avec les exigences du développement durable et les grands principes de conception bioclimatique.
Ces volontés conjointes d’un chantier vertueux et d’une allusion au symbole de la cabane témoignent d’une approche architecturale à la fois technique et sensible. Ainsi, le gros oeuvre opéré en ossature bois est associé à une isolation en paille. Ce procédé d’isolation à la fois modeste et subversif positionne l’équipement à rebours d’un chantier standardisé en faisant valoir la singularité de sa démarche conceptuelle. Le pin du Nord sélectionné pour les éléments de bardage verticaux fait écho à certaines constructions de ce quartier composite. Thermo-chauffé et lasuré pour favoriser sa durabilité et anticiper son vieillissement, le bois présente une teinte sombre, choisie pour ses capacités convectives qui permettront de réchauffer les espaces intérieurs à la saison froide.
Les lignes élancées des débords de toitures surplombant le parvis comme la cour forment le premier abri contre les éléments naturels, qu’il s’agisse de la pluie ou des rayons du soleil. Quand vient l’été, les débords de toiture s’associent à la végétation pour protéger les façades et leurs généreuses baies d’une exposition prolongée au soleil. Le dimensionnement de ces dernières, permis notamment par leurs menuiseries en aluminium discrètes et performantes, bénéficient aux classes qui jouissent d’une grande qualité lumineuse et de vues exceptionnelles sur les aménagements naturels conçus par les paysagistes.
Sur le plan du génie climatique, les architectes et leur équipe font le choix de l’énergie biomasse en équipant l’école d’une chaufferie bois. Pour rafraichir les salles de classe en cas de surchauffe, la simplicité l’emporte à nouveau sur la technique : la ventilation naturelle est privilégiée à l’étage supérieur du corps de bâtiment dédié à l’enseignement. En alliant une juste implantation à une enveloppe bois et paille low-tech, en valorisant les énergies renouvelables et les matériaux biosourcés, l’école Jean de la Fontaine de Tours fait figure d’exemple et de pionnière en matière de sobriété et d’économie de construction. Grâce à ces qualités et à l’honnêteté de la démarche de projet, le projet a su s’inscrire dans le périmètre du label E+C- avec un score méritant : énergie positive 3 et réduction carbone 1.
Maître d’ouvrage : Ville de Tours
Architecte : ALTA architectes – urbanistes
Surface : 1 948 m2 SP
Maître d’oeuvre Exe : Egis / Element.
Paysagiste : Faar Paysage