On peut l’appeler « New-Normal » ou « le monde d’après », mais les récents événements ont accéléré certaines mutations de nos modes de vie et elles impactent singulièrement notre intérieur. L’architecte Camille Hermand est aux premières loges pour observer l’évolution de l’organisation de notre foyer. Elle livre ici toutes ses solutions pour accompagner le changement.
Un bouleversement majeur : le télétravail
Dans le monde d’avant, quand on concevait un nouvel appartement, l’espace bureau passait après les chambres, la cuisine et la pièce de vie. Si la place était comptée, le bureau se résumait à un petit coin dans la chambre ou dans l’entrée et c’est tout. On investissait un vieux meuble de famille, mais en aucun cas un budget conséquent : une table sobre de la grande distribution suffisait. Au début du premier confinement, on a testé le grand idéal de travailler avec son laptop de son canapé. Aujourd’hui, c’est fini. La chaise de bureau est l’investissement de l’année. Le télétravail est une tendance durable dont il faudra tenir compte en architecture car même après la pandémie, beaucoup garderont un temps de travail à la maison.
La solution : une chronotopie bien maîtrisée
Quand la place manque pour aménager un bureau isolé, on se met en quête du mètre carré de bureau quelle que soit la pièce. Nous réalisons des agencements sur mesure qui permettent de maîtriser la chronotopie des espaces de vie, c’est-à-dire leur capacité à remplir plusieurs fonctions suivant les moments de la journée. La pièce de vie est toujours le centre où l’on se retrouve en famille. Mais pour la journée, les bibliothèques avec rangements modulables, les placards avec secrétaire intégré qui se referment hors de la vue en soirée, l’utilisation de la couleur pour délimiter des « zones » dans une même pièce, un bout de couloir isolé en bureau par une verrière ou une demi-cloison sont quelques exemples des aménagements les plus demandés.
Un cadre épuré apaisant
Avez-vous remarqué comme les intérieurs sont bien mieux rangés depuis que nous travaillons chez nous ? Plus de piles qui traînent « en attente de… », plus de bureau encombré de dessins d’enfants et de photos avec juste la place de caser le carnet de post-it pour les courses. Le premier geste salvateur est la clarification du champ de vision. Faire place nette pour éviter la surcharge mentale. Les rangements sur-mesure qui savent exploiter le moindre recoin sont la solution. La bibliothèque du salon, avec ses rangements en soubassement. Dans l’entrée ou les chambres, les armoires invisibles libèrent le regard. Les têtes de lit avec bibliothèque intégrées suffisent à théâtraliser la chambre, plus de tables de nuit ni de commodes. Impossible également de laisser le lave-linge apparent dans une salle de bains. Une petite buanderie, même réduite à un placard dans le couloir, enrichit l’appartement. Ça deviendrait presque un plaisir de laver sa pile de linge : odeur de propre satisfaisante, dépollution mentale entre deux dossiers, c’est du vécu, je plaisante à peine.
Le besoin de s’isoler
Quand on est en call toute la journée ou que les enfants rentrent de l’école, l’idéal est un bureau à part entière fermé. Ce qui est nouveau ce sont les couples qui me demandent si possible un bureau madame et un bureau monsieur. On est prêts à sacrifier de la surface ailleurs. Quand tout le monde est à la maison, la chambre est le refuge apaisant de chacun. Elle adopte des couleurs calmes et naturelles, les matières les plus douces. Par ailleurs, la pandémie a confirmé l’envie d’un espace autre, dédié à la créativité. Il y avait autrefois le boudoir, aujourd’hui c’est le studio pour faire de la sculpture, de la méditation, du yoga, de la couture, céramique, peinture… loin du monde digital.
Du neuf avec du vieux
Tendance lourde qui ne se dément pas : la récup. On réutilise les matériaux, on pimpe les vieux meubles. Recycler est le maître mot, par conscience écologique, mais aussi car les portes anciennes et les carreaux-ciment récupérés apportent un supplément d’âme. Une enfilade scandinave transformée en meuble sous-vasque a plus d’allure qu’un double tiroir standard. C’est aussi moins de matière consommée. Ce n’est pas moins cher, mais c’est plus satisfaisant. On a de plus en plus mal au cœur de jeter : beaucoup de clients me demandent de rehousser leur canapé au lieu d’en changer ou font retailler leur plan de travail en marbre pour l’adapter à leur nouvelle cuisine.
Camille Hermand est architecte DESA, diplômée de l’Ecole Spéciale d’Architecture. L’agence qu’elle a fondée il y plus de 10 ans compte aujourd’hui six architectes et architectes d’intérieur. Circulation de la lumière, fluidité des déplacements, isolation phonique, plan électrique cohérent, mesures d’économie d’énergie, optimisation de l’espace et aménagements sur-mesure, l’équipe livre un projet global et un accompagnement personnalisé, afin que ses clients puissent tirer le meilleur profit de leur espace.
