Une exposition à la Galerie d’architecture à Paris du 16 au 19 octobre 2025 dans le cadre des Journées nationales de l’architecture 2025
Avec la participation d’Amor Immeuble, Agnès Clotis, Antoine Espinasseau, Rimasùu Studio, Traumnovelle et Cyrille Weiner
« En nous tournant vers un des plus vieux mythes de notre histoire, vers l’antique source grecque, nous retrouvons la première figure d’architecte de notre civilisation, Dédale, piégé dans le labyrinthe qu’il a lui-même construit en Crète pour y enfermer le Minotaure. Ne pouvant passer ni par la mer ni par la terre, Dédale conçut un système pour s’échapper par les airs : des plumes collées à la cire sur les bras. On ne retient généralement que la première consigne de Dédale qui consistait à ne pas se rapprocher trop du soleil pour ne pas se brûler les ailes, mais on oublie la seconde, tout aussi importante : il ne fallait pas voler trop bas, proche de la mer, afin que l’humidité n’appesantisse pas les plumes. Ainsi, Dédale, parlant à son fils Icare, le conjure de « voler entre les deux » : inter utrumque uola (Ovide, Métamorphoses, 8, 152-259). »
Dans les poèmes d’Aristophane ou d’Ovide, ce tout premier architecte nous donne une leçon clairement transmise malgré l’épaisseur du temps : c’est une double indication de tempérance et d’exigence, la définition parfaite d’une position médiane et dynamique, la recherche d’un équilibre.
La spectaculaire chute d’Icare, tant de fois représentée dans l’histoire de l’art, de Saraceni à Brueghel l’Ancien, a malheureusement éclipsé la belle leçon de Dédale, le premier architecte occidental. Ce mythe du fond des âges est pourtant un mode d’emploi à l’usage des architectes.
La voie de salut pour les architectes consiste ainsi, depuis la nuit des temps, à tenter de rester dans les strates médianes, en équilibre, en situation intermédiaire, dans une position symbolique de lien entre le haut et le bas. L’architecte devrait être ainsi une figure d’équilibre plutôt qu’une figure d’avant-garde. Cette parole grecque puis romaine n’est pas une sagesse naissante à l’aube de notre civilisation, mais probablement la somme de l’expérience acquise par nos lointains prédécesseurs, lors des trois cents milles premières années d’existence de Sapiens. Cette voie du milieu est une philosophie pratique : l’architecte est en position de médiation par excellence, entre le haut et le bas de la société, mais aussi entre les concepts et les percepts.
Ainsi, au cœur des territoires, en prise avec le réel, l’architecte est souvent le plus petit dénominateur commun de la qualité architecturale et paysagère, situé en équilibre entre les services déconcentrés de l’Etat, les clients, privés ou publics.
A partir de cette expérience humaine fondamentale de la pratique de l’architecture comme une profession intermédiaire dans un milieu d’exercice donné, en présentant des projets réunis dans une même unité de lieu, le canton de Montignac-Lascaux en Dordogne, Sapiens propose d’explorer cette position d’entre-deux, cette notion d’équilibre entre le passé et l’avenir, entre les concepts et les percepts, entre la culture savante et le vécu vernaculaire, entre la posture du savant et celle du bricoleur, entre l’existant et le projeté…
Design graphique : Rimasùu studio
Photographes : Agnès Clotis, Cyrille Weiner
Installations : Amor Immeuble, Antoine Espinasseau, Traumnovelle
Installation sonore : Extrait « Ce que bâtir veut dire », Conférence inaugurale de Patrick BOUCHERON Ensa Paris-Belleville, 26 septembre 2023
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la galerie d’architecture
11, rue des blancs-manteaux – 75004 paris