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Frank Gehry, sculpteur d’espaces libres, est mort

Frank Gehry est mort le 5 décembre 2025 à Santa Monica, à l’âge de 96 ans. Né à Toronto en 1929, formé à Los Angeles puis brièvement à Paris, il développe dès les années 1960 une pratique qui déjoue les catégories : entre pragmatisme constructif, ancrage vernaculaire californien et mise en tension permanente entre structure, matériau et perception.

Ses premières réalisations – de l’atelier Danziger (1965) à la Gehry Residence (1978) – posent les bases d’une écriture fondée sur l’assemblage, la dissociation des volumes et l’usage assumé de matériaux ordinaires, hors de toute hiérarchie. Cette phase, souvent réduite à ses expérimentations “low-tech”, constitue surtout un laboratoire spatial où se dessinent déjà les stratégies de fragmentation, de contournement et de collision qui marqueront les décennies suivantes.

L’introduction du numérique dans sa méthode, via l’adaptation du logiciel CATIA, ne relève pas d’une fascination technologique mais d’une nécessité : disposer d’outils à la hauteur de sa logique projectuelle. Gehry mobilise la modélisation pour stabiliser des géométries instables, négocier la complexité et maintenir un lien direct entre intention sculpturale, ingénierie et fabrication. Bilbao (1997) et le Walt Disney Concert Hall (2003) restent exemplaires non pour leur iconographie, mais pour la manière dont ils ont redéfini les protocoles de conception, de coordination et de mise en œuvre.

En France, plusieurs projets ont prolongé ces recherches sous des formes variées : Festival Disney (1992), American Center (1993), Fondation Louis Vuitton (2014) et Tour Luma (2021). Autant de contextes où Gehry met à l’épreuve son rapport au site, à l’enveloppe, à la lumière, et à l’idée même de monumentalité. Lauréat du Pritzker Prize (1989) et du Praemium Imperiale (1992), Gehry demeure l’une des rares figures dont la trajectoire a simultanément bousculé la culture constructive, déplacé les outils du projet et influencé durablement la relation entre architecture, art et industrie. Son œuvre continue d’agir comme une invitation à repenser les moyens autant que les formes.

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