Au 5 rue des Cloÿs, dans le XVIIIᵉ arrondissement de Paris, Franklin Azzi transforme un ancien parking en immeuble tertiaire lumineux, réversible et bas carbone. Une opération manifeste, ancrée dans le déjà-là, qui démontre que la frugalité peut être source d’élégance et de sens.
Une structure en quête de sens
Les parkings sont décidément des structures pleines de promesses : plateaux libres, hauteurs sous plafond généreuses, robustesse du gros œuvre. Le bâtiment de la rue des Cloÿs ne fait pas exception. Construit en 1930 par l’architecte Prudent, il était initialement destiné au stationnement automobile. En 1982, il est converti en bureaux sans grande cohérence programmatique. Quarante ans plus tard, la maîtrise d’ouvrage (Weinberg Capital Partners – WCP) et Franklin Azzi s’accordent sur une ambition simple : plutôt que de démolir, transformer l’existant, et en révéler les potentialités.
L’intervention s’appuie sur une lecture fine du bâti : elle exploite la trame existante, optimise les volumes, clarifie les circulations. Le rez-de-chaussée est reconfiguré pour ouvrir un hall traversant qui relie les deux rues. Les sous-sols, autrefois aveugles, sont creusés et réorganisés pour accueillir un business center aux volumes atypiques. En cœur de parcelle, le patio est redimensionné, captant davantage de lumière et irrigant les plateaux intérieurs. Chaque geste est mesuré, chaque intervention rendue visible, assumée, lisible.
Travailler avec le climat
Si l’approche programmatique est lucide, le travail sur le climat l’est tout autant. Le bâtiment fait la démonstration qu’on peut agir efficacement sur l’empreinte carbone sans renoncer à la qualité d’usage ni à l’élégance constructive. La conservation du gros œuvre réduit massivement l’impact environnemental. La surélévation en structure bois légère permet d’ajouter un niveau sans alourdir l’édifice. Ce dernier étage s’ouvre sur des terrasses plantées, véritables poches de respiration pour les usagers et l’environnement immédiat.
Le bâtiment vise plusieurs labels (BREEAM Very Good, Wiredscore Silver, OSMOZ) sans jamais basculer dans une logique de vitrine. La conception bioclimatique repose sur des solutions éprouvées : éclairage naturel généralisé, ventilation naturelle favorisée par la morphologie du patio, matériaux durables, toitures végétalisées, économie de dispositifs techniques.
Les façades, entièrement reprises, conjuguent sobriété et caractère. Béton sablé, menuiseries en aluminium thermolaqué, trame rationnelle : l’ensemble propose une écriture rigoureuse, où l’alignement constructif devient langage.
Une esthétique de la transformation
Le projet Cloÿs ne cherche ni l’effet ni la rupture. Il incarne plutôt une forme de méthodologie contemporaine de la transformation urbaine : regarder le bâtiment existant non comme une contrainte, mais comme une ressource ; penser le programme non comme une fin en soi, mais comme un cadre ouvert ; concevoir l’architecture non comme un objet, mais comme un écosystème de relations.
Franklin Azzi revendique ici une esthétique de la structure, où chaque choix est guidé par la cohérence constructive et le confort des usagers. Fini les faux plafonds, place à la générosité des hauteurs libres et à l’expressivité des planchers techniques apparents. L’architecture se montre, mais ne s’impose pas.
Cette posture est aussi politique : dans une ville dense, construite, saturée d’infrastructures obsolètes, la transformation devient le terrain central de l’architecture contemporaine. Cloÿs n’est ni une prouesse ni un prototype. C’est un bâtiment qui fait école : un modèle discret, reproductible, adaptable. Une réponse à la fois sobre et ambitieuse aux enjeux du siècle.
Maîtrise d’ouvrage : WEINBERG CAPITAL PARTNERS
Maîtrise d’ouvrage déléguée – THEOP
Maîtrise d’œuvre
Architecte : Franklin Azzi
Architecte exécutif : EGYDE
Ingénieur façade : ETE
Ingénieur structure : IDF
Ingénieur fluides : SATO
Ingénieur acoustique : IMPACT Acoustic
Ingénieur environnemental : ARP Astrance
Paysagiste : WILD
Surface
Site : 700 m²
Surface de plancher : 3 900 m²
