L’architecte franco-péruvien Henri Ciriani s’est éteint le 2 octobre 2025 à l’âge de 89 ans. Avec lui disparaît l’une des figures les plus exigeantes et les plus lumineuses de l’architecture française contemporaine – un bâtisseur, un pédagogue, un humaniste.
Né à Lima en 1936, Ciriani grandit dans une famille d’origine italienne, entre rigueur militaire et héritage d’architecte. Arrivé en France en 1964, peu après la mort de Le Corbusier, qu’il considérait comme son maître à penser, il rejoint l’Atelier d’urbanisme et d’architecture (AUA), laboratoire engagé sur les questions sociales. Il y participe à plusieurs projets emblématiques, dont la Ville nouvelle de Grenoble et le concours d’Évry, avant de fonder sa propre agence au début des années 1980.
Son architecture, claire et généreuse, explore la lumière et les volumes simples. En 1983, il reçoit le Grand Prix national de l’architecture et l’Équerre d’argent pour la crèche Au Coin du Feu à Saint-Denis, modèle d’humanité et de précision spatiale. Deux musées scelleront ensuite sa renommée : l’Historial de la Grande Guerre à Péronne et le Musée de l’Arles antique, ce « musée bleu » qui semble flotter dans la lumière du Sud. Ces œuvres, unanimement saluées, témoignent de sa conviction que l’architecture « doit aider à mieux vivre ».
Mais Ciriani fut aussi un enseignant décisif. À l’UP7 puis à Paris-Belleville, il a formé des générations d’architectes autour du groupe UNO, prônant une pédagogie du projet sensible et rigoureuse, en résistance au postmodernisme. Ses cours mêlaient exigence et bienveillance, dessin et réflexion, dans une quête constante d’émotion juste.
En 2021, l’Académie des beaux-arts lui rendait hommage en lui décernant le Grand Prix d’architecture – Prix Charles Abella et en exposant ses dessins au Pavillon Comtesse de Caen. L’exposition s’intitulait L’espace émouvant – une formule qui résume sans doute le mieux toute son œuvre. Henri Ciriani laisse derrière lui des bâtiments habités, des élèves inspirés, et une idée simple mais rare : que l’architecture est avant tout un acte de confiance dans la vie.
