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La matière, source d’inspiration pour l’Atelier Delalande Tabourin (ADT)

Au cœur d’une zone résidentielle des années 50 de la ville de Versailles, la maison au volume cubique était d’aspect austère, composée de trois planchers dont un sous-sol inexploité. Le bâtiment est toutefois soutenu par six murs de briques, habillant ses façades telles six imposantes stèles que les architectes Nicolas Delalande et Sébastien Tabourin repèrent pour leur verticalité et leur matérialité venant alléger l’expression de l’édifice.

Leur constat montre également une distribution peu lisible des espaces, une ambiance intérieure sombre et des espaces de vie déconnectés du jardin. Partant de là, les associés d’ADT proposent quatre interventions architecturales, quatre puits de lumière venant perforer les planchers existants et fluidifier les transitions entre les différentes séquences de l’habitat. La figure cylindrique est choisie pour ces nouveaux points de repère autour desquels les espaces vont s’articuler, et dont la matérialité sera au centre des recherches qui suivront.

La matière, fondement du projet
Dès la phase « diagnostic ressource », un long processus de recherche se met en effet en place avec Anna Saint-Pierre, designeuse et chercheuse en réemploi.Les stèles existantes orientent les réflexions et leur prolongement matériel devient rapidement la base de l’intervention voulue comme un « hommage contemporain et responsable au déjà-là ».

Une visite à la briqueterie DeWulf dans l’Oise orientera la démarche des concepteurs qui repèrent alors un immense tas de rebuts correspondant à toutes les briques invendues, malformées ou trop cuites, concassées sur le site. La « chamotte », notamment utilisée par les paysagistes en technique de paillage, sera ici la base matérielle du projet, appliquée par cloutage sur le béton de sol, désactivé ou poncé selon les configurations.

S’ensuit une longue série de tests et de prototypes en collaboration avec les entreprises Cemex et Sols pour le choix de granulométrie. Car en parallèle de ces puits verticaux, les architectes profitent de cette matière pour former, jouant sur sa densité dans les sols, différentes séquences spatiales dans les espaces intérieurs et extérieurs.

ADT révèle ainsi l’ancienne organisation intérieure du bâtiment en faisant ressortir les traces des anciennes cloisons, ou en réutilisant les sols travertins existants du salon en éléments décoratifs à l’exemple d’une banquette maçonnée. Conjointement aux quatre interventions, le traitement des revêtements participe ainsi d’une expérience spatiale et émotionnelle, mettant en exergue les qualités sensorielles de la matière tout en respectant son histoire et les savoir-faire qui l’entourent.

Expression d’un territoire
C’est au contact du Suédois Carl Fredrik Svenstedt qui fut leur enseignant que Nicolas Delalande et Sébastien Tabourin ont développé une affinité pour la matérialité et sa dimension sensitive. Lors de leur diplôme passé en binôme à l’École spéciale d’architecture en 2014 (mention du meilleur diplôme), ils présentent des échantillons de béton de site qu’ils fabriquent alors eux-mêmes. Finalistes du Grand Prix d’architecture de l’Académie des beaux-arts en 2016, ils créent l’Atelier ADT en 2017 à Paris et à Orléans. Leur volonté d’expérimenter l’espace leur vaut d’être nommés lauréats 2020 des AJAP.

La notion de gaspillage de la matière est essentielle dans la pratique de l’atelier, apparue comme telle pour les deux associés lors de la visite d’une carrière de granit en Bretagne, constatant alors la proportion inquiétante de la matière partant au rebut. Les architectes cartographient et quantifient ces déchets, des blocs de quatre mètres de hauteur qu’ils utiliseront pour la réhabilitation-extension d’une maison à proximité. Nicolas Delalande et Sébastien Tabourin privilégient depuis les matériaux issus de la géologie locale et de l’artisanat, en quête de révéler l’invisible expression d’un territoire et de son climat.  


Transformation d’une villa à Versailles
Maîtrise d’ouvrage : Privée
Maîtrise d’œuvre Architecte : ADT – Atelier Delalande Tabourin
Mission réemploi : Anna Saint Pierre – Designer, PhD in Design
BET Structure : Cons-Struct, Chamarande (91)
Superficie : 300 m²
Coût des travaux HT : 450 000 €

Entreprise générale : CPS, Meaux (77)
Sols extérieurs : Sols, Vaux le Penil (77)
Sols intérieurs : Mergozzo, Montbard (21)
Chamotte de brique : Briqueterie DeWulf, Alonne (60)
Béton de chamotte intérieur : Mergozzo, Montbard (21)
Béton de chamotte extérieur : Sols, Vaux le Penil (77)
Béton teinté : Cemex Matériaux, Nanterre (92)


Photos du projet livré © Maxime Delvaux
Documents techniques © ADT

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