A la confluence du Canal de l’Ourcq et de la petite ceinture (19e), quartier Jaurès, se dessine un ensemble de logements.
Un secteur en transformation
Depuis plusieurs années, le canal de l’Ourcq connait une fière transformation. Son caractère strictement fonctionnel, reposant sur une activité artisanale et industrielle – notamment sur le transport de marchandises – se voit relégué au second plan au profit d’activités de loisirs. En lieu et place de l’ancienne usine de chauffage urbain (CPCU), particulièrement reconnaissable avec son grand cube métallique et sa haute cheminée qui participaient de l’identité du quartier, se trouve aujourd’hui un îlot entier au bord du canal accueillant un ensemble de 134 logements (ainsi qu’un supermarché, un commerce, un café) conçu par l’agence TVK pour BDP Marignan. Ce projet illustre l’évolution des lieux et sa nouvelle identité, de la même manière que la crèche conçue par VEA Architectes (2014) située quai de l’Oise, et les immeubles de logements étudiants et sociaux de Lacaton & Vassal (2014), face à la rue de Thionville.
Tour de manivelle
« L’idée fondatrice du projet consiste à déployer les bâtiments en manivelle, afin de créer deux ambiances fortement liées aux grandes pièces infrastructurelles du site. […] Cette disposition instaure une relation indéfectible entre le tout et les parties en même temps qu’une indépendance claire de chaque édifice »
L’îlot entretient une relation directe avec les éléments du patrimoine infrastructurel du site, rendue possible par la reconnaissance et l’appropriation de l’infrastructure du canal. C’est donc le paysage ouvert de celui-ci qui pénètre dans la profondeur de la parcelle, grâce à la réinterprétation du « plan en manivelle », archétype spatial de l’architecture moderne. Au-delà de la condamnation habituelle dont ce plan fait l’objet, Pierre Alain Trévelo & Antoine Viger-Kohler (TVK) l’envisage ici comme la ré-intégration forte d’un élément urbain spécifique. La disposition des bâtiments en manivelle permet à chaque logement de s’installer dans l’environnement, tout en privilégiant les ouvertures et les vues sur le canal grâce à un dispositif en gradin. Depuis les plus petits volumes bâtis aux pieds de l’eau jusqu’aux étages les plus hauts du bâtiment du fond, des plans successifs se juxtaposent, accentuant la profondeur de champ. Les gradins accompagnent la pente douce de la rue de la Marne qui mène au canal, comme une invitation à la promenade sur les quais.
Diversité des modes de vie
Trois corps de bâtiments sont reliés par leur niveau bas au travers des cours, passages et venelles. Un premier corps bâti, aligné sur le quai de la Marne, est revêtu d’une brique sombre, lui conférant une présence étonnante. Le second, orienté est-ouest créé à la charnière entre le canal et la petite ceinture, revêt une brique moutarde de couleur énergisante. Le troisième aligné sur la rue de Thionville se pare d’une brique blanche pour mieux y refléter la lumière. Parallèlement à ce dernier volume, se décline des logements que l’on qualifiera ici « d’intermédiaires » comprenant des toitures terrasses privatives, puis trois maisons de ville en duplex, presque de plain-pied avec le canal, unies à deux jardins, l’un à l’avant, l’autre à l’arrière. La disposition en manivelle, en plus d’offrir trois entrées sur chacune des rues qui bordent l’îlot, permet une grande variation typologique de logements : des T1 et T2 mono-orientés mais toujours bien exposés, des grands lofts en duplex au dernier niveau, des T3, T4, T5 d’angle, des T4 en duplex mono-orientés sur le canal… De fait, chaque logement se voit doté d’une ouverture sur le paysage et de vues privilégiées.
Extérieurs soignés
Par ailleurs, on note la qualité et la diversité des espaces extérieurs. En effet, chaque logement en bénéficie ; les typologies varient selon l’orientation, l’exposition, la hauteur et la caractéristique des logements desservis. Pour certains, ce seront des jardins terrasses, d’autres des balcons filants, d’autres encore de petites loggias en saillies au-dessus du canal. Ces espaces interagissent avec l’environnement proche. A l’arrière de l’îlot, les habitants bénéficient d’un grand jardin collectif privatif – dessiné par Paula Paysage – dont la densité végétale se fond dans le square avoisinant.
« La matière construit à la fois un ensemble simple et unitaire car constitué de la même brique mais témoigne aussi de chacune de ses parties et de sa complexité par le jeu des teintes juxtaposées »
Au delà de la simplicité apparente qu’inspire la brique dans ce programme résidentiel bien conçu, elle rallie le tissu traditionnel faubourien du nord-est parisien et dévoile de grandes qualités de vie extrêmement diversifiées. Depuis ce 22 septembre 2015, les acquéreurs bénéficient d’ores et déjà de la plus belle vue sur le canal de l’Ourcq.
Amélie Luquain
Courtesy TVK / Clément Guillaume