Implantée en plein centre-ville de Calais, l’école d’art dit Le Concept, conçue par Arc-Ame, cache un programme mixte mélangeant l’enseignement et l’habitat derrière une façade cuivrée.
Insertion
Anciennement à l’étroit dans un immeuble quasi insalubre, un centre d’animation artistique ouvert à tous les publics dit aujourd’hui Le Concept, école d’art du Calaisis, s’est vu contraint d’être déplacé. Inscrit dans un schéma urbain de revitalisation du centre-ville projeté par Arc-Ame – contraction d’architecture et aménagement – a été préféré à la périphérie une parcelle issue d’un remembrement complexe dans le quartier industriel Saint-Pierre : une surface désaffectée de grande distribution, en friche depuis une dizaine d’année, située au croisement des quatre principaux boulevards, en face du centre commercial Cœur de Vie. L’école, également conçue par l’agence Arc-Ame, symbolise le renouveau du quartier, respectant l’équilibre et les échelles du contexte dans lequel elle s’insère ; seule sa façade cuivrée est pensée comme un signal, faisant appel depuis la rue.
Transparence
A l’ancien bloc monolithique, Arc-Ame a préféré un édifice en verre, dont la toiture ondulante en cuivre enveloppe le bâtiment jusqu’à se dématérialiser en un rideau tissé en façade. Le hall d’accueil, totalement ouvert sur la rue, assure une percée visuelle jusqu’aux jardins, engendrant une relation étroite entre la ville et le cœur d’îlot. Dépourvu de points porteurs, il devient un espace de médiation, servant de salle d’exposition modulable et polyvalente sur sa double hauteur. La transparence était un des points clés du projet : « elle représentait un défi dans un site urbain ultra-dense avec un programme extrêmement contraint, où elle était impossible à imaginer au départ. C’aurait été une évidence à la campagne, mais pas dans cet îlot que recouvrait totalement un bâtiment en friche, sans aucune lumière naturelle. Nous avons eu l’idée d’occuper l’îlot de façon différente, de creuser le bâtiment pour créer des patios et des jardins », précisent Carole Vilet et Laurent Pezin, architectes associés d’Arc-Ame.

Les plafonds servants dans les ateliers sont constitués de panneaux radians, baffles acoustiques et éclairages suspendus sur fond noir. Pour un aspect « atelier de travail », le mobilier est en bois d’apparence brut, réalisé sur-mesure, avec toujours la prédominance des courbes
Œuvre d’art ?
A la demande d’une architecture pensée comme une œuvre d’art, formulée par la maîtrise d’ouvrage, les architectes répondent par des références artistiques, considérant que l’architecture se distingue des autres formes d’art par sa dimension spatiale. En premier lieu, l’espace a été voulu d’un blanc neutre, telle une toile blanche, afin de laisser libre cours à la créativité des élèves et des enseignants et surtout à l’appropriation. Dès lors, dessins et peintures recouvrent les murs, tandis que les sculptures nous sourient à travers les baies vitrées. Quand aux matériaux, ils s’inspirent, selon les architectes, des différentes formes d’art : « nous avons souhaité que le choix des matériaux exprime la vocation de l’école : être une vitrine au service de multiples disciplines artistiques. Le cuivre travaillé qui recouvre la façade et la toiture, à la convergence entre sculpture, peinture, gravure et architecture, est à ce titre le meilleur reflet de l’ambition artistique du projet architectural. (…) Et ce cuivre tissé fait écho à l’enseignement du tissage, l’une des activités dispensées au sein de l’école. Quant au béton texturé, en opposition avec la patine lisse du cuivre, il se rapproche de la sculpture. Un dialogue s’établit entre le cuivre précieux et lisse et le béton matricé, plus brut. » La maille en façade devient quant à elle un élément structurant du projet : tantôt rideau offrant une lumière douce et tamisée dans les ateliers, tantôt écran, support d’évènements lumineux animant la ville.

En façade principale, la maille de cuivre servant de filtre à la lumière naturelle (50% d’ouverture) et d’écran pour des projections lumineuses, est en aluminium anodisé teint, plus léger que le cuivre. Préfabriquée, elle est arrivée en une seule pièce sur le chantier, puis déroulée le long de la façade. Des poutres butons reprennent les charges.
Mixité
Si l’école est une entité autonome, elle forme un ensemble architectural avec les 25 logements sociaux, posés sur sa toiture, accessible de façon indépendante depuis une rue adjacente. Arc-Ame a en effet mené de front la réflexion sur les deux programmes, afin d’assurer leur unité architecturale. Ces logements sont une superposition de T3 ou T4 en simplex ou duplex, chacun étant traversant et disposant d’une terrasse orientée plein sud. Ils sont accessibles par des coursives donnant sur le cœur d’îlot, c’est à dire sur le jardin central de l’école, les patios plantés et les toitures engazonnées, conçus par l’agence de paysage Babylone.
Objet singulier du centre-ville de Calais, l’école, depuis le parvis, appelle autant qu’elle sait se faire discrète, participant à la revitalisation du centre-ville plutôt que de privilégier l’expansion périphérique.
Amélie Luquain
Fiche technique
Maîtrise d’œuvre : Arc-Ame. Programme : Réalisation d’une école d’art de 16 classes et 25 logements sociaux. SDP : 5650 m2. Entreprise générale : Rabot Dutilleul Construction. Ingérop Nord-Ouest BET TCE ; BET acoustique AVA; paysagiste Agence Babylone. Cout des Travaux : 10,43 M€ HT. Livraison : juin 2015
Courtesy Arc-Ame / Michel Denancé