Mirages durables, voyages d’architectes, nuages flottants, gare fantôme, Puticlub de la frontera, chasseurs de design, Libeskind, Fuksas, Montebourg : la revue de presse du 3 novembre 2016

Via 94 citoyens
Ignorés
Surnommés les « Indiana Jones » du design vintage, ils n’ont pas l’allure sexy d’Harrison Ford et ne drainent pas dans leur sillage une bonne odeur d’aventure et de sable chaud. Au contraire : ceux qui rampent pour les besoins du métier dans des boyaux exigus parfumés aux effluves de moisi sont souvent « des types qui n’ont l’air de rien, qui n’éveillent pas les soupçons », relate le Monde Magazine, sauf qu’« en fait, ils connaissent tout mieux que les autres ». L’hebdomadaire dresse le portrait de ces figures clés du commerce de l’art, section design « Le premier maillon de la chaîne du marché des pièces de collection, c’est eux. Ils cherchent, trouvent, puis revendent leurs découvertes aux salles de vente aux enchères ou aux galeristes les plus influents ». Qui sont-ils ? Difficile à dire. « Ils partagent une passion commune pour le design, mais ces découvreurs n’ont pas de profil type. Il y a le baroudeur fou d’Afrique, le collectionneur en costume, l’architecte archiviste, le routard au volant de son camion. Certains vivent de leurs recherches, d’autres sont juristes, pharmaciens, dentistes, commerciaux… ». Dénicher des objets dont la côte tutoie les sommets himalayens n’en fait pas des millionnaires « La plupart ne roulent pas sur l’or. Avant l’appât du gain, c’est le plaisir de la quête et l’adrénaline de la découverte qui les animent. » À notre grande surprise, « les chasseurs de design ne sont pas reconnus officiellement. Les salles de vente aux enchères les appellent “des amis”, certains galeristes vont jusqu’à nier leur existence et les services qu’ils leur rendent. Les protecteurs du patrimoine les accusent d’être des “pilleurs” sans foi ni loi. » Ils réclament aujourd’hui une reconnaissance que les ténors du marché leur nie. Que sorte de son placard 70 le Spielberg qui rendra un juste hommage à ces Aventuriers de la contremarche perdue !
Via M le magazine
Vaporeux
Après 18 ans de péripéties, le Premier ministre Mateo Renzi vient d’inaugurer dans le quartier de l’EUR à Rome « un rêve devenu réalité », le centre des congrès dessiné par Massimiliano Fuksas. Un rêve devenu chiffrage, aussi, puisque côté finance, le nouveau bâtiment accumule les superlatifs et aligne les zéros avant la virgule. Il aurait coûté 239 millions d’euros selon Fuksas, ou 467 selon le sous-secrétaire à l’économie et les finances, et devrait rapporter 350 millions d’euros par an selon des calculs fortement mis en doute. Outre les honoraires de l’architecte – 24 M€ – les frais de retransmission télévisés de la cérémonie d’inauguration (1 M€ d’après les estimations des spécialistes), un autre chiffre retient l’attention : 17 000. Soit la quantité d’acier – en tonnes – employée à la construction du bâtiment, trois fois plus que pour la tour Eiffel. Une partie de ce métal forme la carcasse du blob laiteux occupant l’espace central du centre de conférence. Prière de ne pas qualifier cette chose de « nuage », sous peine de fâcher l’auteur. Fuksas rejette ce nom de baptême qu’il met sur le compte de l’imagination des Romains. Faux, s’insurge la blogueuse Eleonora Carrano : « il (Fuksas) devrait pourtant savoir que lorsqu’ils attribuent des surnoms, ses concitoyens ne sont ni bienveillants ni bucoliques » citant pour mémoire « le cafard », surnom de l’auditorium de Renzo Piano. En fait, rappelle Carrano, le sobriquet fut suggéré par Fuksas en personne, dans une publicité réalisée en 2000 pour un constructeur automobile. L’indignation de Massimiliano, une petite tentative d’enfumage pour faire oublier un spot malheureux, tourné par l’architecte qui se trouvait alors sur un petit nuage.

via Il fatto quotidiano
Numero Uno
Number One, numéro un, la place que l’Espagne vient de prendre sur le podium du tourisme sexuel. « L’Espagne a dépassé Amsterdam », affirme sans craindre de comparer un pays à une ville le quotidien espagnol El Mundo au terme d’une enquête sur le sujet. Jugeons sur pièce : nos voisins ibériques tirent de la prostitution – une activité prospérant dans un vide juridique – un chiffre d’affaires annuel de 2 milliards d’euros, soit 0,35 % du PIB. Le secteur occupe 45 000 travailleuses, et sa santé se mesure aussi en terme d’urbanisme et d’architecture. Des villes se recentrent sur cette activité pensée d’abord pour les touristes étrangers : « la cité catalane de La Junquera, à six kilomètres de la frontière française et à peine une vingtaine de kilomètres de Perpignan, est richissime en terme d’offre de bordels littéralement à ciel ouvert. Il Paradise, avec plus de deux cents entraîneuses disponibles chaque soir, est le plus grand établissement du secteur en Europe. 15 dollars, à l’entrée, restaurant avec cuisine catalane, zone fumeur, service de sécurité omniprésent ». Le phénomène se reproduit à la frontière portugaise, elle aussi fourmillante de « Puticlubs ». « Nous avons un réseau énorme de bordels, près de 1500, explique un chercheur, auquel s’ajoute en sus une flopée d’appartements privés qui dissimulent des femmes impliquées dans la prostitution, qui recrutent les clients par petites annonces ou tracts jetés dans la rue ». Une pratique qui perdurera jusqu’à la création d’un AirBnBeat ou autre site spécifiquement dédié à cette forme de tourisme.
Sinophilie
Le tourisme – d’affaire cette fois – fleuri dans l’hexagone, qui accueille à bras ouverts les futurs investisseurs chinois. « Le tapis rouge était déroulé devant la mairie d’Alfortville, pour recevoir le président du groupe hôtelier chinois Huatian, Chen Jiming, actuellement en visite en Paris ». Il s’agit de réinventer Chinagora, simili morceau de la cité impériale de Pékin construite à la confluence de la Marne et de la Seine dans les années 90. Un site exceptionnel déjà identifié comme tel par l’une des équipes participant à la consultation du Grand Paris en 2007. En 2016, le Hub du Grand Paris pourrait participer au projet, en finançant les études du projet, deux tours conçues par Jacques Ferrier pour de grandes ambitions « une tour signal, symbole de l’entrée dans la capitale, “le phare de la Chine à Paris, promet Luc Carvounas, le sénateur-maire PS de la commune, qui veut ‘hystériser le rapport à l’eau’ ».
Via 94 citoyens

Via 94 citoyens
Implantés
Ils s’installent : « nous sommes extrêmement fiers que Santiago Calatrava, Zaha Hadid architectes, Foster+Partners et Benoy ait choisi de faire de D3 leur nouvelle adresse» a annoncé Mohammad Saeed Al Shehhi, chef du développement de D3. D3 pas comme la ville en crise du Michigan, mais comme Dubaï Design District, un secteur de la ville regroupant des industries dites créatives. L’annonce a été faite en marge de la Dubaï Design Week. D’après le MENA Design Outlook Study, une étude commanditée par le Conseil dubaïote de la mode et du design, le marché régional de l’architecture croît à un rythme plus rapide que l’industrie mondiale. Plus vite qu’Alfortville, vraiment ?
Via The National
Learning from Euralens
Pendant que des chinois voient s’hystériser les bords de Marne, d’autres se promènent dans le bassin minier lensois. Des architectes et urbanistes chinois en stage pour trois mois dans différentes agences d’architectes ont pris part à des visites organisées par le ministère du logement et de l’urbanisme «Lens peut être un très bon exemple pour de nombreuses villes chinoises en cours de transformation. Intégrer la culture à la reconversion, c’est le genre de projet qui n’a pas encore réussi chez nous » détaille Xin Tan. Et pourtant le problème se pose aussi dans le Céleste Empire «Nous rencontrons des problèmes depuis quarante ans dans ces villes où l’industrie minière s’effondre et il est très important de coopérer avec des villes modèles en la matière, explique Benjamin Zang». Les étudiants ont pris exemple sur Loos, indique la Voix du Nord. Il s’agit de Loos-en-Gohelle et de son projet Réhafutur. Et pas de l’architecte autrichien, auteur d’«Ornement et Clim», ouvrage militant pour l’intégration artistique des blocs de climatisation aux façades d’immeubles dont la lecture est vivement conseillée aux architectes exerçant dans la Chine du sud.
Via La Voix du Nord
Surprise de taille
«Il peut surprendre quelques-uns, d’autres y adhéreront», prévient Christian Estrosi à propos du projet de 19 000 m2 comprenant commerces, bureaux, salles de sports, etc. Le président de la métropole raboteur de bureaux à ses heures (voir revue de presse du 24/10/2016) décrit le bâtiment «il est taillé comme un diamant». Les médisants verront plutôt un déraillement de train inox dans ce grand jeu de cube posé à proximité de la gare de Nice, Daniel Libeskind, son architecte, le compare « à une sculpture, car il peut être vu depuis tous les angles ». La Compagnie de Phalsbourg pilotera la construction de ce Guggenheim du retail, qui semble transplanter en centre-ville les logiques du commerce de périphérie, contre lequel elle s’élevait autrefois.
Via 20 minutes

Via 20 minutes
SOS Fantômes
Pas encore achevée et déjà fantôme : c’est le sort de la gare de la Mogère « ce chef-d’œuvre de l’architecture ferroviaire moderne, une gare-pont jetée par-dessus les voies de la nouvelle ligne TGV de contournement entre Nîmes (Gard) et Montpellier (Hérault), fierté absolue du savoir-faire français (…) pourrait être livrée en décembre 2017 pour la coquette somme de 145 M EUR. Si les travaux ne sont pas interrompus d’ici là…», relate Le Parisien. Car la Région ne veut plus payer les 26 millions d’euros qu’elle avait promis et pour une bonne raison « En effet, cette semaine, lors d’un comité de pilotage d’anthologie, la direction de la SNCF a avoué que le chef-d’œuvre ne serait desservi que par quatre trains par jour, deux départs et deux arrivées ». La gare pourrait trouver une utilité avec l’ouverture du sillon Montpellier-Perpignan, programmé aux alentours de 2035, dans le meilleur des cas. En attendant le chef de train Godot « à Montpellier, on cherche désespérément à trouver une vraie destination à cette gare plantée au milieu de la campagne : nouveau palais des sports, annexe du musée d’Art moderne pour y exposer des statues géantes. Ou plus grand night-club du sud de l’Europe… Avec vue imprenable sur le trafic des trains de marchandises ». Bizarrement, ils semblent avoir mis de côté l’hypothèse du parc d’attractions avec Train Fantôme !
Via Le Parisien
Trop vanté
C’est un arbre étrange, dont les feuilles sont de mini-éoliennes capables de couvrir les besoins annuels en électricité d’une famille de quatre personnes. Produit par New Wind, cette innovation avait déchaîné l’enthousiasme. Arnaud Montebourg présidait le conseil de surveillance dans cette start-up dans laquelle il avait investi son argent personnel. La commune de Velizy, Icade à Aubervilliers ou la banque Piguet-Galland à Genève s’étaient portées acquéreur de ce beau sujet à 70 000 euros pièces. « Vingt jours après ces fulminants débuts (l’inauguration en grande pompe à l’entrée d’un centre commercial à Bochum, en Allemagne, le 4 novembre 2015), un gros coup de vent à fait tomber plusieurs feuilles (…) elles pèsent tout de même 2 kg. Quand elle chute de 10 mètres de hauteur, ça peut faire mal»; raille le volatile. La trop forte vibration des feuilles et un défaut de construction métallique a déclenché les mêmes problèmes, conduisant à l’installation d’une zone de sécurité de deux mètres au pied de l’arbre, à défaut d’en débrancher les branchettes. Le constructeur de l’arbre accuse Eiffage infrastructure de malfaçons dans les pièces métalliques. « Cet arbre est un prototype, défend Montebourg, l’idée c’était de développer le principe de l’autosuffisance énergétique dans d’autres endroits, comme les gardes corps pour les toitures ou encore des pylônes ». Il faudrait 2 940 arbres à vent pour fournir l’équivalent d’une éolienne classique, a calculé un site allemand. La promenade dans l’electro-bois s’annonce périlleuse quand le watt n’y est pas.
Via « L’Arbre de Montebourg ? Du vent…», Le Canard enchaîné, 26/10/2016
Durablement obsolète
Le stade olympique de Londres n’est simplement pas adapté au football et devrait être démoli. C’est le constat sans appel porté par un expert sur l’équipement phare des olympiades 2012, pourtant conçu pour être recyclé à l’issue de l’évènement, à l’instar de bien d’autres installations de ces jeux qui se voulaient durables. L’ancienne arène d’athlétisme est devenue la base de l’équipe de West Ham avec l’extinction de la flamme olympique. « Le stade est pauvre en termes footballistiques, il nourrit de mauvais comportements», explique l’expert au Daily mail. Malgré une dépense de 280 M£ pour transformer ce bâtiment à 700 M£, les pistes d’athlétisme éloignent trop les spectateurs du terrain, les mauvaises séparations des zones transforment les gradins en champ de bataille pour les supporters des équipes opposées, le contrôle de la foule en dehors du stade est difficile. « Des gradins amovibles ont été utilisés pour couvrir les pistes d’athlétisme, laissant des creux sous les échafaudages (…) West Ham a essayé de couvrir ces creux avec un tissu bleu et lie de vin, mais admet avoir demandé en début de saison aux chaînes de télévision de filmer leur terrain depuis des angles plus favorables ». L’agence d’architecture Populous, qui avait fait de cette transformabilité un point fort du projet, n’a pas souhaité commenter. Spécialisée dans ce type d’équipement, Populous soutient la candidature de Paris au jeux 2024. Elle pourrait peut-être nous donner les contact permettant le rachat à bas prix de son stade désormais inutilisable?
Via The Daily Mail et The Architect’s journal

via The Architect’s journal
Olivier Namias