L’exposition Les universalistes, à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, sous le commissariat de Nuno Grande, offre un regard prospectif sur les cinquante dernières années d’architecture portugaise, qui ont vu naître deux Pritzker, Alvaro Siza et Eduardo Souto de Moura, ainsi que bon nombre d’architectes portugais talentueux.

Architectes portugais en voyage à travers la Grèce durant l’été 1976. Entres autres Fernando Tavora et Alvaro Siza (à droite) @ Archive de l’architecte Alexandre Alves Costa
A la question que peut apporter l’architecture portugaise à la France, Alvaro Siza nous répond très simplement : « l’architecture portugaise peut apporter à la France ce que la France peut apporter au Portugal ». Sergio Fernandez modère ces propos en soulignant une forte transversalité architecturale européenne, le fait étant que le Portugal n’a rien a apporté à la France, si ce n’est des habitudes, des façons de faire. Eduardo Souto de Moura, quant à lui, critique la claustrophobie dont souffre la France au regard de sa réglementation et pense que le Portugal peut apporter sa « fraicheur ». Quoi qu’il en soit, chacun d’entre eux est d’accord pour dire qu’il n’y a pas une architecture portugaise mais une façon de faire qui s’inscrit dans un rapport d’altérité et de compréhension de l’autre.

Stade municipal, Braga, Portugal (2000-2004), Eduardo Souto de Moura @ photo : Luis Ferreira Alves
Au travers d’un demi siècle de production architecturale, l’exposition Les universalistes défend le point de vue selon lequel les architectes portugais ont su trouver un équilibre entre un héritage universel de l’histoire de l’architecture et des contraintes géographiques et culturelles des lieux où s’érigent leurs œuvres. Autrement dit, ils ont su opérer une fusion entre le « global » et le « local », résultant d’un contact permanent avec les cultures de l’autre, marqué par le voyage, la colonisation, la diaspora… propre à l’histoire du Portugal.

Quartier de Sao Victor, Porto, Portugal (1974-1976), Alvaro Siza @ Archive MoMa (New York)
Au fil de l’exposition, la notion d’universalisme se confronte à d’autres thématiques, qui ont marqué l’histoire architecturale du Portugal.
– (inter)nationalisme (1960-1974), soit l’influence de l’internationalisme moderne, mais aussi du nationalisme, dans la phase ultime de la dictature portugaise
– colonialisme (1961-1975), dans un rapport de domination de l’autre
– révolution (1974-1979), en vertu d’une discussion contre les systèmes, pour l’abattement de la dictature
– européanisme (1980-2000), dans un processus d’intégration du Portugal dans la communauté Européenne
– globalisation (2001-2016), avec pour impact le vivre ensemble et donc une culture globale
Par universalisme, entendons donc non pas un mouvement portugais, mais une façon de faire architecture. Un universalisme qui se définit « par défaut » selon le philosophe Eduardo Lourenço, mettant en évidence la manière dont la culture architecturale portugaise s’inscrit dans sa propre condition historique, à la fois « hétéronymique » (être moi et l’autre) et « hétérodoxe » (être d’ici et du monde)
Amélie Luquain
Pour en savoir plus, rendez-vous dans le prochain numéro d’Architectures CREE