Brenac & Gonzalez & Associés et MOA architecture se sont associés pour réaliser l’ilôt E du nouveau secteur Chapelle International, situé à deux pas de la porte de La Chapelle à Paris (18e arrondissement). Dans un secteur encore en travaux, l’atelier parisien et l’agence marseillaise livrent un lot mixte composé d’un socle SOHO (Small Office Home Office) et de deux tours qui mêlent locaux commerciaux et logements, à l’instar de ce qui se fait à Hong-Kong ou à Tokyo.

Entouré d’un square à la parisienne, dans l’attente de voir ses pavés assemblés, d’une promenade qui mènera des sites olympiques de Seine-Saint-Denis à la Gare du Nord, et de la rue de la Chapelle, l’îlot E fabrique sa propre orientation. Afin de tirer parti des vues alentours, les bâtiments sont tournés de 45 degrés vers l’ouest, offrant ainsi une vue imprenable sur la colline de Montmartre, la basilique du Sacré Coeur et même la Tour Montparnasse à l’horizon.
La structure verticale, véritable ville à plusieurs niveaux, joue de plusieurs écritures de béton et d’un mélange des matériaux afin de ne pas reproduire le paysage urbain qui l’entoure. Ce mélange de béton brut, de béton non-structurel, de bois et d’aluminium casse les codes jusqu’alors portés par les tours génériques héritées des années 1960.
Le SOHO, rez-de-ville actif

Le socle commun du projet revisite la notion de travail : il rattache les locaux d’activités aux logements. Au total, ce sont 20 locaux commerciaux disponibles en RDC, d’une hauteur de 3,80 mètres et accessibles depuis l’espace public.
Le SOHO est découpé en deux, dans la longueur, par une rue intérieure à vocation double. D’une part, elle dessert à la fois les locaux et les premiers logements situés juste au-dessus offrant de vastes prises de lumière naturelle et favorisant la vie communautaire, à l’image des faubourgs de la capitale. D’autre part, elle relie les deux tours qui se dressent de chaque côté.
La tour E1

Signée Brenac & Gonzalez & Associés, cette tour est percée en son centre afin d’en diluer la densité. L’interstice, qui baigne alors de lumière, a été végétalisé afin d’en faire un lieu de villégiature. L’escalier extérieur attenant relie les deux tourettes pour former la tour E1.
La transition entre la ville basse, le SOHO, et la ville haute, les logements, se fait par l’intermédiaire de cinq étages habillés de balcons filants. Du R+2 au R+6, le bâtiment prend ainsi des airs modernes d’immeuble haussmannien. La skyline, qui monte de R+6 à R+16 est elle constituée d’un exosquelette en béton préfabriqué blanc finition matricée travertin. Un matériau qui contraste avec les pointes chaudes des volets et menuiseries bois, de façon à faire briller la structure au milieu d’un paysage urbain sombre. La vêture bois disparaît sur les deux derniers étages pour laisser place à un bardage aluminium anodisé qui reflète la ligne du ciel.
La tour E2

Au bout de la rue intérieure, MOA architecture emboîte deux géométries urbaines. La première tour “urbaine”, en béton brut de décoffrage habillée d’une modénature sophistiquée, fait face à la rue. Elle est perforée de fenêtres avec ouvrant de grande largeur, totalement occultable par un volet en bois coulissant. Les loggias qui se trouvent derrière ces murs, et qui sont le résultat de la fusion des deux géométries, offrent des espaces extérieurs protégés des vues et des aléas du climat.
La tour “paysagère” s’appuie en porte-à-faux sur un socle en béton. Les quatre premiers niveaux assurent la stabilité du bâtiment et marque son identité. Sur les six derniers, la trame de béton se dilate en doubles niveaux et, comme la tour voisine, laisse place à une façade réflectrice qui donne l’impression que la structure disparaît dans les nuages.

La particularité de ce bâtiment repose dans son enveloppe. À l’image de la “Hancock Tower” de Fazlur Khan à Chicago, elle est pensée comme un exosquelette. De cette façon, la tour E2 voit son poids réduit d’un tiers par rapport aux tours “Miessiennes” à noyaux de béton. Une économie de béton qui ravi autant sur le plan environnemental qu’architectural. En effet, l’exo-structure permet de reconfigurer à volonté les espaces utiles et les espaces de distribution du noyau, qui sont définis par des murs non-porteurs.
Rémi de Marassé