Koolhaas en politique, Parlement à vendre, le mythe des 500 000 logements, Piano inaugure la fondation Stavros Niarchos à Athènes, Maroc : le cafouillage du MNAST à Rabat.

Musée national d’archéologie et des sciences de la terre (MNAST) à Rabat par Archi5/OKA
Classe politique
C’est souvent du côté de la jeunesse que l’on s’attend à voir surgir la relève d’une classe politique démonétisée. Peut-être à tort : le Brexit a suscité des vocations pour les affaires publiques, comme chez cet architecte hollandais septuagénaire, commissaire de la biennale d’architecture de Venise en 2014. « Il faut s’engager. Si l’Europe ne se réveille pas, nous aurons un grand problème aux Pays-Bas. Mon pays sera le prochain à s’accommoder des discours populistes, le prochain à demander la sortie de l’Union Européenne. Et je ne veux pas rester passif. Je ne sais pas encore comment, mais j’ai décidé de passer à l’action politique pour éviter ce risque », a déclaré Rem Koolhaas au journal El Pais en marge des conférences du IV congrès international d’architecture organisé par la fondation architecture et société à Pampelune. « J’ai toujours pensé que mon architecture pouvait résoudre plus de problèmes que mon action politique. Le populisme m’a fait changer d’idée ». Rem, bientôt à la tête de la Commission Européenne ?
Via El Pais
A Vendre
Les conséquences de la possible désintégration de l’UE n’ont pas tardées à se faire sentir dans le secteur immobilier, ainsi qu’en témoigne cette annonce : Suite à Brexit, bâtiment d’exception à Strasbourg. Flatteur pour Architecture Studio, concepteur de l’objet de la vente, le Parlement Européen, proposé à 47 millions d’euros. Points forts du bien, sa localisation, bien sûr : à quelques kilomètres de l’Allemagne et idéalement placé(s) pour l’évasion fiscale du côté suisse.(…) Pour les transports un aérodrome existe/subsiste à 19 km au sud de la ville. Mais étant donné la faible fréquence des vols, aucune nuisance sonore n’est à prévoir de ce côté là.…Les acheteurs potentiels doivent prévoir deux jours de visite, avertissait le vendeur, un agent immobilier facétieux et anonyme se présentant sous le nom de Strasbourgeois, auteur de ce canular posté sur le site Le Bon Coin. Dans la vraie vie, le siège strasbourgeois du Parlement européen est souvent montré du doigt pour sa sous-occupation. A défaut d’une vente, pourquoi pas une location sur Air B’n B ou OfficeGOOD, son équivalent dans le monde du bureau?
via France bleue
Le mythe des 500 000
Pourquoi ne pas prendre le canular au sérieux, et construire dans ce parlement notoirement sous-utilisé une partie des logements dont la France a si cruellement besoin ? On le sait : dans l’hexagone, un million de logements manquent à l’appel, ce qui impliquerait d’en construire 500 000 par an. Le chiffre indique un but qui reste à atteindre année après année, et dans cet attente, ne fait que mettre le doigt sur un retard français de plus. Le constat de la carence est partagé par le gouvernement, les professionnels et les associations : une unanimité rare dans le secteur du bâtiment. Ce chorus devrait peut-être arrêter de chanter à tue-tête « le million, le million », explique la journaliste Catherine Sabbah, qui déconstruit dans Les Echos ce mythe numérique. Elle s’interroge sur le sens de ce chiffre martelé par tous les gouvernements depuis son apparition en 2006 dans un rapport de la fondation Abbé Pierre, lui-même basé sur des statistiques de l’INSEE dénombrant 700 000 personnes « aux portes du logement ». Sur la longue période, le stock de logement a crû plus vite que le nombre de famille, constate la journaliste, qui rappelle que le pays n’a jamais réussi à construire ces quantités de logement qu’au cours de la période la plus productiviste de son histoire, les trente glorieuses, laissant derrière elle un encombrant héritage. « Entre 2005 et 2015, le nombre de logements vides a augmenté de 900 000. Tiens donc, on n’est pas loin du million… Ils sont répartis dans le parc social, dans des villes en déclin ou personne ne veut plus habiter, dans le parc privé, dans des lieux plus attractifs, où contre toute rationalité économique, des propriétaires préfèrent conserver leurs logements vides plutôt que de voir un locataire s’incruster. Ils sortent aussi du marché pour se transformer en résidences de tourisme », détaille Sabbah. Peut-être le début de la fin pour les politiques d’aménagements construites sur des logiques de grands nombres, au mépris des réalités territoriales et sociales ? On peut rêver…
Via Les Echos
Un temple à l’austérité
Ubuesques festivités à Athènes, où l’on vient d’inaugurer en fanfare le Centre culturel de la Fondation Stavros Niarchos. Occupant un site de 20 hectares utilisé comme parking lors des derniers jeux olympiques, le bâtiment porte la prestigieuse signature de Renzo Piano. Il a été ouvert ce weekend à grands renforts de concerts et feu d’artifice, relate Oliver Wainwright sur place pour The Guardian. Sauf qu’il n’est pas ouvert, et qu’aucune date d’ouverture n’est annoncée, poursuit le critique d’architecture, les étagères de la bibliothèque, calibrés pour deux millions de livres, restent vides, les portes du parc restent fermées… La fondation de l’armateur Stavros Niarchos a fait le cadeau – empoisonné – du bâtiment à l’Etat grec, contraint à des politiques d’austérité qui lui interdise de faire tourner cette machine culturelle réclamant au bas mot 900 employés pour fonctionner correctement. Echoué au milieu de son grand parc, le projet à 566 millions d’euros ressemble pour l’instant à la ville porte-avion du photomontage réalisé en 1966 par Hans Hollein, vaisseau fantôme sillonnant la campagne autrichienne…Mais doté du label LEED Platinum ! « Construire un bon bâtiment est un acte civique majeur », a expliqué Piano lors des cérémonies d’ouverture. « Dans des moments difficiles comme celui-ci, on a besoin d’espoir ». L’espoir que ça ouvre, au moins : la fondation se rajoute à la longue liste des équipements livrés mais jamais utilisés, fruits dispendieux et manifestement inutiles construits lors de la bulle immobilière dégonflée par la crise de 2008.
via The Guardian
Musée où t’es?

Musée national d’archéologie et des sciences de la terre (MNAST) à Rabat par Archi5/OKA

Musée national d’archéologie et des sciences de la terre (MNAST) à Rabat par Archi5/OKA
Ca cafouille pas mal à Rabat, nous apprend l’édition marocaine du Huffington Post, autour du projet du futur Musée national d’archéologie et des sciences de la terre (MNAST). Sa construction devait être confiée à une équipe franco-marocaine associant Archi5 et Omar Kobbité architecte (OKA), déclarée lauréate du concours international le 26 aout 2010, remportant une consultation à laquelle participait les équipes de Nouvel, Hadid ou encore Gregotti. Mais depuis six ans, plus rien. Le projet a été déplacé, passant de l’ancienne résidence de Lyautey à la vallée de Bouregreg. Pire encore, le MNAST a fait depuis l’objet de nouveaux concours. La candidature des lauréats de 2010 à l’une de ces consultations a été rejetée pour vice de forme.
Différents courriers aux ministres et ambassadeurs n’ont pas débloqué la situation. L’Ordre des architectes de la région Rabat-Salé a aussi essayé d’en savoir plus sur les raisons du déménagement, qui seraient « politiques », sans que l’on en sache plus. Il n’est pas normal qu’on ait recours à des architectes qui mobilisent des moyens très importants pour leur dire que c’est annulé par la suite, s’insurge Mnebhi Loudiyi, président de l’Ordre régional, évoquant plusieurs faillites consécutives à ces annulations. Sauf que dans le cas du MNAST, le projet n’a jamais été annulé, ce qui interdit aux lauréats de percevoir une indemnité ou un quelconque dédommagement. Pour Loudiyi, ces cafouillages en série ne sont pas un cas isolé. Ils viennent des lacunes du décret réglant la passation des marchés publics marocains. En attendant qu’elles soient comblées, il demande à tous les architectes de cesser de participer aux concours ! Trop tard pour le énième concours du MNAST, lancé en mars 2016, mais un conseil à suivre pour tous ceux tentés par les concours de maîtrise d’ouvrage publique dans le royaume chérifien.
via HuffPost Maroc
Olivier Namias